Sommeil et travail

Contenu publié le : 14 avril 2014 et modifié le: 21 janvier 2021

Sommeil et travail posté ou à horaires atypiques

En France, 1 salarié sur 4 travaille en horaires décalés ou de nuit. Le travail de nuit concerne 15,2% des salariés soit 3,5 millions de personnes (enquête DARES, 2011).

Nos horloges biologiques malmenées

Ce type d’horaires de travail est toujours perturbant pour l’organisme. Il met à mal les rythmes biologiques. Nous avons des horloges dans le cerveau qui contrôlent les différentes fonctions du corps (le rythme de la digestion, des secrétions hormonales, de la force musculaire, du sommeil….).  C’est la lumière du jour qui permet à nos horloges de bien caler nos rythmes entre eux pour fonctionner de manière optimale. Si cette synchronisation ne se fait pas ou mal, la désorganisation qui en résulte aboutit à la perte de la programmation de ces fonctions qui se font alors au coup par coup. Tout notre corps fonctionne alors dans le stress avec des conséquences qui sont maintenant bien connues : troubles digestifs, prise de poids, risque d’hypertension, ou de troubles du rythme cardiaque, mauvais sommeil ou insomnie majeure.

S’adapter ou pas ?

Le travail de nuit ou le travail posté est d’autant mieux supporté qu’il s’inscrit dans un choix et une motivation forte. Malheureusement les conditions de travail ne remplissent pas toujours ces conditions idéales et sont plutôt subies que choisies. Il y a des personnes qui ne tolèrent pas d’emblée les horaires imposés et sont donc nécessairement orientées vers d’autres postes. D’autres le tolèrent assez correctement et ce sont le plus souvent de courts dormeurs.
Entre les deux il y a des personnes qui s’adaptent dans un premier temps mais qui, souvent à l’occasion d’un changement dans leur vie (vie en couple, arrivée d’un enfant, décès d’un proche, accident, …), n’arrivent ensuite plus à suivre le rythme.
Plus on est jeune, avec une typologie de sujet du matin, mieux on tolère le travail posté. Les femmes semblent avoir plus de difficultés. L’un des premiers signes d’intolérance est l’apparition d’une insomnie. Une étape supplémentaire est franchie quand la personne est obligée de prendre régulièrement des hypnotiques.

Les conséquences du travail posté ou du travail de nuit

La plupart des études montrent une diminution du temps de sommeil total associé au travail posté et/ou de nuit. On a objectivé une augmentation du risque de somnolence durant la période d’éveil. Les risques d’accidents de la circulation sont multipliés par 2. Ils sont plus importants lors du trajet aller avant un poste du matin, et lors du trajet retour après un poste de nuit.
Quelles que soient les modalités d’organisation du travail posté, les postes de nuit et les postes très tôt le matin (avant 7h) sont responsables d’un temps de sommeil court et d’une somnolence. Les mêmes effets sont observés pour les postes très longs (> 16 heures) et les longues semaines de travail (> 55 heures). Pour cette population de travailleurs, on relève plus d’accidents du travail et plus d’arrêts de travail.
Les risques sur la santé sont loin d’être négligeables. Globalement ces horaires de travail qui entrainent des ruptures de rythme favorisent un surpoids avec une augmentation modérée de l’indice de masse corporelle. Les risques cardio-vasculaires sont connus de longue date avec une augmentation modérée du risque de maladies cardiovasculaires et d’hypertension.
Moins bien connus sont les risques cancérigènes. Celui qui est le plus établi concerne le cancer du sein. Les résultats de 2 méta-analyses (Megdal, 2005 et Erren, 2008) rapportent une augmentation de 40 à 51% du risque de survenue d’un cancer du sein chez les femmes en travail posté et/ou de nuit. Il n’y a pas de preuve concernant l’implication causale de la mélatonine ou de la  réduction du temps de sommeil, néanmoins on note  une tendance à une augmentation du risque quand le temps de sommeil est inférieur à 6 heures. En ce qui concerne le cancer colorectal ou le cancer de la prostate, les données laissent suspecter un accroissement du risque en association avec le travail posté et/ou de nuit. Cependant, les données sont insuffisantes pour confirmer ou infirmer ce risque.

Comment diminuer les conséquences du travail de nuit ou du travail posté ?

Certaines recommandations de la Société Française de Médecine du Travail (2012) concernent l’organisation du travail sur laquelle le travailleur n’a souvent que peu de possibilités d’action directe. Ainsi, les rotations en sens horaire semblent avoir moins d’effets délétères sur le sommeil et la vigilance que les rotations en sens antihoraire. Pour prévenir les durées de sommeil raccourcies sur 24 heures, il est recommandé d’éviter les rythmes de rotations rapides (2 à 3 jours) et de préférer des rythmes de rotation intermédiaires de l’ordre de 4 à 5 jours.
Les conditions d’éclairage des salles de travail sont aussi tout à fait déterminantes. L’exposition à la lumière avant et/ou au début de chaque poste, ou bien encore la présence d’une lumière de haute intensité pendant le travail posté, sont recommandées pour faciliter l’adaptation au travail posté ou au travail de nuit. Dans tous les cas la limitation de l’exposition à la lumière en fin de poste est recommandée pour faciliter le sommeil.
Sur le plan de ce que doit faire le travailleur pour limiter le retentissement du travail posté ou de nuit, un certain nombre de recommandations concerne essentiellement la gestion du sommeil et l’utilisation de la caféine et de la lumière :
•    Respecter un temps de sommeil quotidien supérieur à 7 heures par 24 heures.
•    S’astreindre à une bonne hygiène de sommeil en particulier en maintenant des horaires  de sommeil les plus réguliers possible (y compris pour les siestes).
•    Une prise unique de caféine (sous la forme d’un café) en début de poste peut améliorer la vigilance au travail.
•   Durant le travail de nuit, et tout particulièrement en cas de poste de sécurité, une sieste courte (inférieure à 30 minutes) est recommandée. Cette sieste peut être effectuée avant la prise de poste ou au cours des pauses durant le travail selon les possibilités.
•    Se protéger de la lumière en portant des lunettes de soleil en rentrant le matin à la maison  pour se coucher.

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